Législatives : Pourquoi En marche va avoir la majorité à l’assemblée nationale

Tous les concurrents de la République en Marche (REM) ont intérêt à laisser penser qu’une cohabitation est possible, pour maintenir une mobilisation de leur électorat et limiter la casse.

Mais il est largement probable que REM aura une majorité, et probablement absolue.

I : Des logiques politiques

Un vote par défaut ?
Le second tour si particulier, contre le FN, et surtout un premier tour resserré entre 4 candidats, peuvent laisser penser à certains que Emmanuel a été mal élu, par défaut… C’est en partie vrai, inévitablement au vu de la situation politique particulière. Mais c’est à nuancer. Ce n’est ni la première fois,  ni significatif. Ce sont surtout des éléments de langage de Mélenchon qui veut faire oublier qu’il a terminé 4eme de l’élection, voire 5eme si on inclue les abstentionnistes (comme il le fait pour l’analyse du second tour..).

Je trouve indécent que tous ces partis qui ont perdu suite à une campagne longue et fatigante veuille refaire le match, refaire le débat, remettre en cause la légitimité de l’élection dès la proclamation des résultats, parfois de manière offensante pour les électeurs macronistes convaincus…

D’ailleurs si on considère que entre 40 et 60% des électeurs de Macron l’on choisi par conviction, selon les enquêtes, cela représente plus de voix que le vote d’adhésion pour LePen, à 80%. Il n’ y a donc pas eu besoin des votants barragistes pour gagner, cela a seulement suffit à amplifier.

Etre minoritaire et obtenir une majorité ?

Certains analystes font un contresens : une enquête à indiqué le soir de l’élection que seulement 40% des électeurs souhaitaient que Macron ait une majorité législative. Une autre enquête quelques jours suivant indique 52%. Pour certains, ces chiffres sont faibles, et augurent d’une possible faiblesse législative.

Or c’est loin d’être le cas : d’une part il faut comparer avec les autres partis, question non posée : combien veulent une majorité FN, une majorité FI ou une majorité LR ? Structurellement, lorsqu’il y a plusieurs forces politiques proches, personne n’emporte une adhésion majoritaire.

De plus, avec sa position centrale, susceptible de recueillir des votes de barrages à la fois de droite comme de gauche, selon les cas, on peut penser que En Marche sera par ailleurs souvent bien placé au second tour. Beaucoup se joue donc au premier tour. Quelques points d’avance au niveau national peuvent suffire à faire une large différence. Comme à la présidentielle, le premier tour détermine le second.

Gauche morcelée et faible, droite démobilisée, prime présidentielle

La gauche morcelée, entre la France Insoumise, mais aussi le PS, et de nombreux petits partis, communistes, verts, sera très probablement balayée dans des proportions inattendues.

L’état de faiblesse du PS, dont beaucoup ont tourné la page, en fera seulement un boulet pour la France insoumise. Localement, quelques figures bien implantées peuvent encore se hisser au second tour, mais il n’y aura probablement pas plus de quelques dizaines de députés, peut être même moins de 20.

D’autant que la France Insoumise a une partie de son électorat moins participationniste (jeunes, quartiers populaires métissés), ce qui se ressent plus fortement aux législatives. Et que sa position entre les deux tours a été critiquée par une part de sa base.. Là encore, même si Mélenchon arrive à faire une campagne forte, qui mobilise, qui garde vers lui les électeurs PS conquis à la présidentielle, il pourra difficilement obtenir plus de quelques dizaines de députés.

La droite peut-elle résister ? Une forte dramatisation des législatives, qui entraine une abstention faible, et un effondrement du FN, en difficulté de leadership, peuvent-elles entrainer une cohabitation ?

Cela ne me parait pas possible. En effet, c’est ce parti qui a fait corps autour de Fillon, et cela lui est reproché.
Ce parti qui a appelé au Front républicain, ce qui a pu heurter une partie de son électorat droitier. Enfin un parti qui a perdu, qui est traversé de tensions, même si cela ne se traduit pas encore par des transferts de cadres.
Macron a progressivement orienté sa campagne vers le centre droit. Encore en ce moment, en laissant ouverte la possibilité d’investir des députés LR, il tend un piège : qu’ils viennent ou pas, les électeurs de centre droit sont la véritable cible, la porte leur est ouverte même si les députés ne viennent pas..

Ils peuvent néanmoins stabiliser leur score, et devenir largement le premier groupe d’opposition.

Enfin, il y aura nécessairement une prime présidentielle. Ceux qui ont gagné se mobilisent plus. Et même parmi ceux qui n’ont pas voté En marche au premier tour, ou qui ont voté par vote utile, une partie significative (mais combien..) ne voulant pas d’une cohabitation, ou voulant lui laisser sa chance, vont voter pour lui. Effectivement, quelle déception s’il n’avait pas de majorité, quel gachis, cette pussillanimité ne serait pas comprise au niveau international…

Un point positif pour le nouveau Président est qu’il a été largement caricaturé  pour des raisons politiciennes par ses adversaires de campagne : il sera facile à Emmanuel Macron de démontrer dans les semaines de prise de fonction qu’il n’est pas que l’héritier de Hollande, que malgré sa jeunesse il a la profondeur et l’intelligence nécessaire, qu’il n’est pas le banquier sans cœur que certains ont décrit avec malignité, et qu’il ne fait pas preuve de timidité sur la sécurité.

Pour entraver ce scenario, il faudrait un affaissement du FN au profit de LR, et une nouvelle campagne très dure, faisant par exemple des législatives un referendum sur le droit du travail, comme le souhaite Mélenchon.
Mais il reste 3 semaines de campagne, et les Français ont une attention moindre à la politique, se débranchent un peu après une longue campagne présidentielle. Le gouvernement va être nommé, sauf erreur grave il sera difficile de modifier la dynamique favorable à REM.

Cela sera donc probablement une victoire large ou très large en fonction de la campagne de En Marche

II : L’application aux circonscriptions

Dans le modèle que j’ai élaboré sur la base des résultats du premier tour, cela donne ainsi une victoire large pour En Marche.

Même en prenant l’hypothèse pessimiste, cela donne une majorité absolue à En Marche.

Voici mes hypothèses:

 Participation différentielle EM FN LR FI PS
participation sociologique (age, csp) 0,15 -0,2 0,2 -0,15 0
niveau de demobilisation, dynamique 0,2 0,15 -0,1 -0,15 -0,15

Retour Vote utile ou contraint (absence EELV, PC..) Vers EM Vers FN Vers LR Vers FI Vers PS Vers autres
De EM 0,02 0,02 0,15 0,02
De FN 0,02
De LR 0,05
De FI 0,2 0,1
De PS 0,1

Moindre personnalisation élection /enjeux locaux/ candidats indé Vers EM Vers FN Vers LR Vers FI Vers PS Vers autres
De EM 0,15 0,15 0,05
De FN 0,15 0,02
De LR 0,1
De FI 0,05 0,05
De PS

Perte LR suite à consolidation FN 2eme tour Vers EM Vers FN Vers LR Vers FI Vers PS Vers autres
De LR 0,03

II/ Gain pour éviter cohabitation
Gain cohérence présidentielle (base électorat Macron car vient compenser le retour de vote utile..) EM FN LR FI PS De autres
En faveur de EM 0,1 0,2 0,05

Et le résultat de cette simulation en pourcentage au niveau national :

EM FN LR FI PS
20,47% 17,09% 21,30% 10,78% 12,09%

Avec une présence au second tour :

EM FN LR FI PS
357 232 496 21 26

Au deuxième tour,j’ai fait des hypothèses de report en fonction des configurations de second tour. Face au FN, j’imagine qu’il y aura un front républicain, mais plus faible que lors de la présidentielle. Face à LR, ou à FI, je pense qu’une partie des autres candidats se reportera sur EM, force la plus centrale face à l’adversaire. Au niveau local, l’abstention au second tour sera plus forte dans ces cas de figure, mais une partie de l’électorat de gauche préfèrera voter En marche et majorité présidentielle, plutôt que LR et cohabitation incertaine.

Voici ce que cela donne :

EM FN LR FI PS
305 6 237 2 15

Cela montre donc que même avec une hypothèse faible, EM autour de 21%, selon mes hypothèses, proche de LR, REM obtient une majorité absolue.

Deux nuances :

  • mes hypothèses de second tour sont peut être un peu trop favorables à En Marche.
  • il s’agit d’une projection qui ne tient pas compte des particularités locales (sauf sous forme d’un léger bonus global pour LR et PS). Il y a quelques élus bien implantés, connus et reconnus, du PS comme de la France insoumise, ou de LR, qui peuvent déjouer ce pronostic hors sol.

Mais ce qu’il faut en retenir, c’est que vu la situation politique fracturée, et la position centrale de REM, il lui suffira d’être légèrement devant au niveau national, c’est à dire massivement au second tour dans les circonscriptions. 

L’enjeu de la participation est donc important. En dessous de 60% de participation au niveau national, il n’y a quasiment plus de triangulaire, ce qui favorise En Marche car souvent c’est la gauche qui n’est pas qualifiée, malgré un score conséquent mais éparpillé.

III : les derniers sondages

Le dernier sondage paru est largement plus favorable à REM : avec un niveau élevé pour En Marche (29%), et une dynamique favorable puisqu’il progresse depuis le soir du second tour. Selon mon modèle, cela aboutirait à une large majorité absolue.

France insoumise fait également un bon score, un peu mieux que ce que j’anticipe dans mon modèle, mais largement inférieur à celui de la présidentielle (14%).
Le PS n’a quasiment pas de sursaut, car il perd des électeurs vers REM et vers les verts.

http://www.bfmtv.com/breves-et-depeches/legislatives-en-marche-en-tete-des-intentions-de-votes-selon-un-sondage-1162106.html

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