Mi-février 2007
J’ai adhéré au PS, et les positions de la future candidate me plaisaient. Mais par la suite, lors des primaires, j’avais soutenu DSK, sans devenir un antiségoléniste virulent. Les premiers mois de 2007 ont été difficiles, mais malgré des doutes croissants refoulés, je me suis laissé prendre par le combat militant, que je ne regrette pas. Entre les trois candidats principaux, les trois projets, c’était le moins pire.
Après la présentation du programme, avec le groupe R2 auquel j’appartenais, j’écris cette tribune de décryptage pleine d’espoir. Elle reste assez juste, avec des avancées dans le discours, mais aussi les insuffisances relevées en conclusion qui n’ont pas trouvées de réponses.
Que retenir du discours de Ségolène Royal hier ?
Les commentaires sont nombreux. Certains n’ont pas lu le discours, et commentent les commentaires, sans voir les nouveautés des orientations.
Ce fut un discours à plusieurs partitions et plusieurs voix, mêlant notamment le socialisme tendance libérale et social-démocrate, la mise en mouvement de la société et les régulations souples, et le socialisme de la puissance publique, contraignante et interventionniste.
Le projet du parti est toujours là, mais réorienté et enrichi par les propositions originales de la campagne interne, des débats participatifs, des divers travaux.
Nous avions des réserves à propos du projet socialiste. Le programme hier présenté nous convient mieux. Ainsi, nous nous félicitons des principes mieux affirmés :
-de la claire prise en compte de la contrainte de la dette
-de l’absence de hausse de la pression fiscale
-de la volonté de réconcilier les Français avec l’entreprise
-de l’ambition de réformer l’Etat, notamment à travers la régionnalisation
-de la promotion d’un nouveau syndicalisme plus puissant et partenarial.
ou encore de quelques propositions nouvelles, dans le détail : maisons des parents, developpement du soutien aux personnes en situation de handicap, scolarisation dès 3 ans, non cumul des mandats,co-developpement, le president de la commission des finances qui appartiendra à l’opposition, reforme du senat, suppression du 49-3
Zoom sur l’ouverture audacieuse consacrée à la dette, et les passages évoquant l’entreprise et la production de richesses, la réforme de l’Etat et à la décentralisation.
L’esprit et presque la lettre de notre motion et de nos contributions :
« Pour surmonter ces crises, il faut une France Neuve. Voilà ce que vous m’avez dit. Et voilà ce que j’entends mettre en œuvre.
Comment augmenter les bas salaires si les entreprises ferment ? Comment augmenter les petites retraites si les déficits se creusent ? Comment augmenter l’effort pour l’éducation
et la santé lorsque la dette explose ? Telles sont les questions que vous m’avez posées. Mais vous m’avez dit aussi que chaque nouveau droit devait aller de pair avec des devoirs.
Et vous l’avez fait avec une franchise, une lucidité, une volonté de refuser les solutions toutes faites et les fausses promesses des marchands d’illusion, vous l’avez fait avec une
rigueur dont je dois vous dire qu’elles m’obligent. Et c’est pourquoi j’ai décidé de vous parler en premier de notre situation économique et, en particulier, du problème de la dette.
La dette publique est devenue insoutenable. Elle représente 64% du PIB et 18 000 euros par Français. Les intérêts qu’elle génère sont devenus à eux seuls la 2ème dépense du
budget de la Nation. Le déficit des comptes sociaux a triplé. La sécurité sociale est grevée par plus de 80 milliards de déficit cumulé. Notre appareil productif est affaibli. Notre
commerce extérieur affiche un déficit de 30 milliards d’euros. La production industrielle stagne et l’investissement productif des entreprises ne décolle pas. Voilà la France qu’ils
nous laissent. Voilà l’état des lieux au sortir de la période qui s’achève.
Et c’est à vous, c’est à moi, c’est à tous les Français qui, à partir d’aujourd’hui nous rejoindront, qu’il appartient de relever le pays.
Je suis convaincue, par exemple, qu’il faut changer, de toute urgence, notre façon même de concevoir la création de valeurs et de richesses. Je suis convaincue qu’un
développement durable repose aujourd’hui sur trois piliers (économique, social, environnemental) et que la défaillance d’un seul peut faire crouler le tout. Nous sommes la 5e
puissance économique mondiale. Mais nous devons ce rang au travail des Français qui conquièrent des marchés, innovent, prennent des risques et travaillent dur. Et je suis
convaincue que nous ne tiendrons durablement ce rang que si nous recréons notre capacité à mobiliser les compétences, à motiver les salariés et à créer, en fait, ce vrai dialogue
social qui reste, en France, si terriblement archaïque.
L’inventivité des entrepreneurs doit être, reconnue. Mais la dignité du travail doit être respectée et même remise à l’honneur. Avec cette reconnaissance et ce respect, nous réussirons comme l’ont fait ….. Voilà pourquoi je m’engage à tout faire pour que, si je suis élue, un nouvel essor soit donné à la démocratie sociale et au dialogue social constructif qui va avec. Et voilà pourquoi je m’engage, en même temps, à soutenir l’effort des entreprises innovantes et créatrices d’emplois. C’est ce que j’appelle les cercles vertueux.
Je le crois de toute mon âme : nous avons les moyens de relancer la croissance et la machine économique. Je veux réconcilier les Français avec l’entreprise pour sortir la France des
déficits et accomplir des progrès sociaux dont nous avons besoin.
J’en ai pris une claire conscience tout au long de ces semaines passées à écouter et observer : nous sommes un pays d’excellence technologique où pas un jour ne passe sans que
des hommes et des femmes se lancent pour donner corps à un projet créateur d’activité, de valeur et d’emploi. Eh bien, je suis reconnaissante à ces entrepreneurs du risque qu’ils prennent et qui permet de créer, chaque année, les emplois que la mondialisation financière déplace. Je sais gré à ces PME de moins de 250 salariés qui sont plus de 2 millions en France et qui sont nos premières créatrices d’emplois.
Et je m’engage aujourd’hui, devant vous, à tout faire pour soutenir leur effort et pour créer l’environnement dont elles ont besoin et qu’elles méritent.
Je m’engage aussi à faire de la recherche et de l’innovation une des priorités majeures de mon mandat. Je m’engage à augmenter le budget national de recherche-développement de 10 % par an. Sur les 65 milliards d’aide aux entreprises, seuls 5 % sont orientés vers la Recherche et l’innovation, je m’engage à porter cette part à 15%. Par des mesures fiscales, je m’engage à encourager les entreprises à innover et à faciliter, pour cela, leur accès aux financements bancaires. L’Etat soutiendra les pôles de compétitivité qui associent laboratoires et entreprises dans des réseaux d’excellence. Trop de régions attendent aujourd’hui une aide de l’Etat qui ne vient pas ! Eh bien l’Etat, si je suis élue, soutiendra les porteurs de projets, partout où ils se trouveront, en généralisant les Ateliers de la Création.
Je m’engage à ce que les entrepreneurs qui garantissent les emprunts de leur entreprise sur leur patrimoine propre soient sécurisés par un mécanisme de caution mutuelle.
Je veux aussi que l’école et l’entreprise se rapprochent.
Je veux que l’entreprise devienne un lieu familier aux jeunes dès l’enseignement secondaire et jusqu’à l’université. Je le veux parce que vous le voulez. Et vous le voulez parce que l’insertion professionnelle de nos enfants et, donc, leur choix de métier et d’avenir en seront facilités.
Les Français, je l’ai également compris, aspirent à voir l’Etat réformer profondément sa gestion pour dégager des économies et donc des marges d’action.
Sans doute cette réforme sera-t-elle, chez nous, plus difficile à mener qu’ailleurs. Car la France, n’est-ce pas, s’est constituée autour de son Etat central ! Car il fut, cet Etat, partie prenante à sa construction, sa puissance, sa grandeur ! Mais nous devons agir.
Nous avons un Etat qui est devenu beaucoup trop lourd. Nous avons trop de ministères. Nous avons des ministères qui ont, en dix ans, changé huit fois de périmètres et donc de
dénominations avec toutes les dépenses inutiles, toutes les pertes d’efficacité, que cela suppose. Il faut réformer tout cela. Il faut alléger le poids de nos administrations. Il faut les
mettre au service des citoyens alors que, trop souvent, les citoyens ont le sentiment d’être le jouet des administrations. Il faut soulager des administrations centrales qui s’épuisent à gérer des personnels répartis sur le territoire et des crédits de toutes sortes.
Il faut en finir avec cette lourdeur de l’Etat central qui engendre toujours plus de textes législatifs ou réglementaires – et des textes qui, bien souvent, sont à la fois illisibles et inutiles. Les fonctionnaires en sont les premières victimes lorsqu’ils s’épuisent en réunions stériles au lieu de donner l’impulsion et la créativité dont ils sont porteurs et qui sont leur vraie vocation.
Face à cette situation, face à ce gaspillage d’énergie et de substance, je propose :
– de limiter le nombre de ministères,
– d’en finir avec l’inflation réglementaire qui nous caractérise trop souvent
– d’expérimenter à chaque fois pour réformer vraiment
– d’engager une nouvelle étape de la régionalisation, mettant fin à la ruineuse superposition des
compétences. Ce sont les régions qui, par exemple, mettront à niveau les bâtiments et résidences universitaires.
C’est aux régions qu’incombera la tâche de sortir les prisons françaises de l’état honteux où elles se trouvent. Ce sont les régions qui piloteront le service des aides économiques et de la formation professionnelle.
L’Etat, certes, garantira par un fond de » péréquation » l’égalité entre les régions qui bénéficieront donc, pour remplir ces nouvelles missions, d’un transfert de ressources. Mais nouvelles missions pour les régions, il y aura. Nouvelles intelligences territoriales, on verra naître. Et tant pis pour ce vieux jacobinisme qui est l’un des démons les plus malins de ce pays ! J’ai la passion du service public. Je sais que les Français sont habités par la même passion. Et, aussi, les fonctionnaires qui ont une conception exigeante de leur mission.
Ensemble, nous allons donner un coup de jeune à cet Etat colbertiste, jacobin, centralisé à l’excès, croulant sous le poids des ans, des bureaucraties inutiles et des réglementations
trop complexes. Ensemble, nous allons mettre l’Etat à l’heure de ce désir d’autonomie, de responsabilité civique et de liberté que j’ai senti monter d’un bout à l’autre de la France. »
Bien sûr; certains passages, ou certaines propositions sont critiquables. Et il y a encore des manques ou des insuffisances : quelle fiscalite ?, quelle réforme des retraites ? quelle politique de sante ? etc… Mais cela va dans le bon sens.
Cela s’ettofera encore jusqu’à la mi-mars sur ces points, participons-y.
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